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(Le texte ci-dessous, écrit par Monsieur Risto Lainović, fut publié comme préface au livre Pasquala Ivanovitch et autres pages monténégrines de Pierre Loti (Éditions Pardès, Paris, 1991, p. 7-20). UN TRÈS GRAND REMERCIEMENT à M. Lainović, docteur ès lettres et chevalier dans l’Ordre des Palmes académiques, qui nous a donné certains de ses textes précieux que nous allons continuer à republier ici.)
Pierre Loti n’aurait pas été un turcophile conséquent s’il avait aimé le Monténégro, pays réputé être le plus tenace ennemi européen de la Turquie. L’histoire de cette petite principauté est marquée par ses luttes contre l’Empire ottoman.
Slaves, des mêmes origine, langue et religion que le Serbes, les Monténégrins eurent leur État dès le XIe siècle sous le nom de Zéta, celui de Monténégro (Crna Gora) ne devant apparaître que trois cents ans plus tard. Ce pays changea fréquemment de frontières et fut parfois réduit à un espace fort limité, mais – jusqu’à la Grande Guerre, quand il sera occupé par les Autrichiens – garda toujours une autonomie plus ou moins grande : une ile de liberté dans l’énorme océan ottoman. Soucieux de sauvegarder leur autonomie et leur indépendance, les Monténégrins, peuple habitué à une vie pénible sur un terrain aride et montagneux, n’hésitaient pas à affronter, les armes à la main, non seulement les Turcs, mais aussi les Byzantins, Vénitiens, Italiens, Albanais, Autrichiens, Français (de Napoléon), Italiens, Allemands. Les siècles d’une vie dure dans un environnement hostile laissèrent nécessairement leur empreinte sur la physionomie du montagnard monténégrin. Selon Loti, ce montagnard avait l’air d’un bandit ; il lui inspirait de la méfiance. Et quoique les allusions de l’écrivain français concernant son inquiétude dans les défilés des montagnes monténégrines fussent vraisemblablement faites par besoin de dramatiser le vécu artistique, rien d’étonnant à ce que ce montagnard slave, costaud, moustachu et armé jusqu’aux dents, inspirât la peur à celui qui ne le connaissait pas bien.